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Évolution des modèles de consommation alimentaire et des pratiques culinaires

Dernière mise à jour : 18 juin 2021

Comme le souligne le sociologue Jean-Pierre Poulain (2002), la période contemporaine est traversée par des mouvements qui retravaillent, réorganisent, reformatent l’espace social alimentaire.


Dans cet article, nous avons donc décidé de nous intéresser à la modernisation des modèles de consommation alimentaire et aux nouvelles pratiques culinaires.


Des pratiques culinaires qui deviennent multiformes


De nombreuses études sociologiques sur l’alimentation et les pratiques culinaires montrent que les changements industriels et sociétaux ont favorisé la modification des pratiques culinaires qui deviennent multiformes.


On assiste, par exemple, à une réduction du temps passé à préparer les repas et du temps passé à table, à une augmentation de l’intégration de produits transformés dans les repas, à une simplification des repas, à l’augmentation des consommations hors domicile, ou encore au développement des repas solitaires. Cette réduction du temps de repas s’accompagne d’une consommation plus importante de produits surgelés ou de fast-food.


La recherche de praticité observée traduit une évolution des modes de vie. Ces modifications de comportements paraissent sous-tendues par des transformations profondes de la société ; telles que le rapport au travail, l’urbanisation, le travail des femmes.


Une alimentation dirigée vers le plaisir et la santé


A côté de ces pratiques qui peuvent s’inscrire comme une remise en cause des pratiques culinaires traditionnelles, on observe un intérêt massif pour la dimension santé et le bien-être alimentaire. Au cours des vingt dernières années, la sensibilité des consommateurs à l’importance de bien manger pour leur santé a progressé régulièrement (Hébel, 2008).


La cuisine, n’est plus seulement une activité domestique nécessaire, elle est également envisagée comme un plaisir (Piquandet, 2012), une activité de loisirs (Régnier et al, 2006), une façon de cultiver son bonheur et son harmonie personnelle (TNS Sofres, 2014). Ces nouvelles pratiques et tendances s’accompagnent, par ailleurs, d’une couverture médiatique jamais égalée. La thématique de l’alimentation, à travers des émissions de cuisine, par exemple, contribuent à faire porter le regard du plus grand nombre sur les pratiques culinaires.


Un nouveau mode de consommation en réponse à un nouveau mode de vie


Au regard de ces nombreux éléments, on constate que les pratiques culinaires se modifient avec le temps pour répondre à de nouveaux modes de vie et aux conditions qui leurs sont associées. Ces modifications portent à la fois sur les formes prises par ces pratiques, entendues au sens de mise en œuvre, et leurs significations. Lesquelles répondent par ailleurs à un certain nombre de règles : ce qu’il faut manger ou ne pas manger, comment faut-il manger, comment faut-il préparer les aliments, etc. (Lalhou, 2002).


A l’heure actuelle et par suite de facteurs internes (perception du bon et du moins bon, attache à la valeur nutritionnelle) et externes (vache folle, crise économique de 2008) à la société, les pratiques et habitudes culinaires des Français ont bien évolué.


Une forte croissance du marché des plats préparés


Alors que de manière générale le budget “alimentation” à domicile ou hors domicile tend à se réduire, les ready meals ou plats préparés connaissent une hausse considérable entre 1960 et 2014. Selon une étude de l’Insee, en 1960, les ménages affectaient 34,6% des dépenses de consommation en alimentation tandis qu’en 2014 les ménages y affectent 20,4% de leurs dépenses de consommation, soit en moyenne 3 600 euros par habitant sur l’année. Cette baisse de budget ne semble pas avoir eu d’effet conséquent sur l’achat des plats tout prêts contrairement aux autres produits d’alimentation puisque, toujours selon cette même étude de l'Insee, la croissance annuelle par habitant de la consommation de plats préparés en France entre 1960 et 2014 est de 4,4%.


De manière plus précise, selon une étude de l’INPES parue en avril 2010, passant de 32,2% en 2002 à 47,3% en 2008, la proportion de personnes ayant déclaré avoir consommé un plat tout prêt au moins une fois par semaine a très nettement augmenté. Cette hausse de consommation des ready meals peut se caractériser par le mode de vie, plus urbain, plus pressé mais peut aussi se caractériser par d’autres faits sociétaux. Le fait que l’activité féminine se développe, que les trajets domicile-travail s'allongent mais aussi que le pouvoir d'achat augmente sont des faits qui tendent à délaisser les modes de cuissons et les pratiques traditionnelles pour des pratiques plus rapides, permettant de gagner du temps. Le consommateur veut un mode de consommation pratique qui lui permet de manger de manière simple et rapide, pouvoir économiser du temps afin de l’administrer à une autre activité.


Mais, une tendance à reconsommer des plats fait maison


Mais depuis peu, le home-made culinaire ou fait maison, qui avait été quelque peu délaissé, revient au sein des foyers. De manière générale, le fait maison est un mode culinaire qui tend à tout préparer soi-même plutôt qu’à acheter en magasin.

Il est cependant compliqué de définir exactement ce qu’est le fait maison ou du moins quelles en sont les limites. Une étude de Storebrands, effectuée aux États-Unis, démontrent ainsi que la réponse à la question "qu’est-ce que le fait maison ?" dans le domaine culinaire va dépendre du répondant. Pour certains, le temps de préparation et le nombre d’ingrédients sont des critères décisifs qui font d’une préparation, un plat cuisiné maison.


Nous avons décidé, dans notre cas, de garder la définition générale et d’opposer le concept de home-made à ready meal.

Dans cette perspective, un plat cuisiné maison est :

• Un plat fait maison plutôt qu’acheté en magasin ;

• Un plat qui résulte d’un processus de préparation en partant de plusieurs aliments “bruts” ;

• Un plat qui n’est pas prêt à être servi sous sa forme brut en opposition au ready meals ou plats préparés.


En termes de pratiques, le fait maison s’inscrit de plus en plus au sein des foyers français. En effet, d’après un sondage mené par Harris Interactive mené entre le 12 et le 21 octobre 2016, auprès d’un échantillon de 1 000 personnes représentatif de la population française âgée de 15 ans et plus, 22% se considèrent "experts, ou experts intermédiaires" en cuisine, 47% "intermédiaires" et 17% ont déjà suivi un cours ou un atelier de cuisine. Le fait le plus marquant est que 81% des répondants déclarent respecter une alimentation équilibrée au quotidien. Un autre sondage plus récent, réalisé en ligne par Ipsos pour INTERBEV du 18 au 22 janvier 2019 sur un échantillon de 1 066 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession, catégorie d’agglomération et région), met en évidence le fait que dans leur grande majorité, les français cuisinent régulièrement leur repas eux-mêmes avec des produits non transformés (85% de l’échantillon représentatif).


La crise économique des années 2008 et suivantes (nécessité pour les ménages les plus modestes qui doivent faire face à d’importantes contraintes budgétaires de limiter les dépenses liées à l’alimentation) , la prise de conscience socio-écologique et de nombreux autres facteurs principalement internes à la société tels que l’adhérence à une communauté responsable, la responsabilisation du consommateur dans les enjeux socio-écologiques ont permis le développement de cette tendance qu’est le home-made culinaire ou le fait maison.

 

Article rédigé par Pierre HUGUENY, Suely MANGENOT et Camille THOMAS

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